Le Canada a un problème nazi
Il y a un problème avec les nazis à Ottawa.
Non, je ne fais pas référence à la standing ovation donnée à la Chambre des communes à un vétéran de 98 ans de la division Waffen-SS Galicia, composée de collaborateurs nazis ukrainiens. Je reviendrai plus tard sur cet épisode honteux.
Je fais référence aux attaques organisées et continues contre la conseillère scolaire d’Ottawa, Nili Kaplan-Myrth. Elle est entrée dans la ligne de mire de l’extrême droite pendant l’occupation du convoi où elle a utilisé sa plateforme pour les dénoncer et s’y opposer. Elle milite sans relâche en faveur de meilleures mesures de santé dans les écoles, notamment en rendant obligatoire le port du masque pour les enfants et la vaccination. Et elle est une championne inébranlable de l’inclusion et des espaces sûrs pour tous dans les écoles, et une ardente défenseure des droits des trans.
Bref, elle est tout ce que les fascistes méprisent.
Kaplan-Myrth a été soumis à un ignoble barrage d’attaques antisémites anonymes sur les réseaux sociaux. Elle et sa famille ont été harcelées et menacées. Des fanatiques d’extrême droite anti-LGBTQ+ l’ont prise pour cible et ont tenté de rassembler les réunions du conseil scolaire pour l’attaquer. Certains de ses collègues administrateurs, qui sont de droite, sont de connivence avec les attaques.
La police n’a pas réagi aux attaques racistes et haineuses. Kaplan-Myrth, un rebelle, a refusé de reculer et continue de défendre publiquement l’inclusion dans les écoles publiques malgré le risque personnel.
Il y a un problème nazi dans le Lower Mainland de la Colombie-Britannique.
Des affiches pour un rassemblement « Whites Only Mom and Tots » sont apparues dans les banlieues de Coquitlam et de Port Coquitlam à Vancouver. Il dit notamment : « Échappez à la « diversité » forcée et rejoignez d’autres fiers parents d’enfants européens alors que nous créons une atmosphère dans laquelle nos enfants peuvent se sentir à leur place. »
Les événements de la « Fierté européenne » sont une tactique de longue date des groupes nazis et suprématistes blancs, pour tenter de donner une tournure positive à leur racisme.
Il y a un problème nazi à London, en Ontario.
Par une agréable soirée de printemps 2021, les membres de la famille Afzaal sont allés se promener. Nathaniel Veltman les a vus et a conduit son camion sur le trottoir et a assassiné 4 membres de la famille.
Veltman admet qu’il adhère à la propagande nazie, aux théories du complot et à la haine islamophobe. Pour lui, le simple fait de voir une famille ouvertement musulmane s’amuser était une motivation pour commettre un meurtre.
La ville de Québec a un problème nazi. Saskatoon a un problème nazi. Les Forces canadiennes et la police sont des terrains d’entraînement et de recrutement pour les groupes fascistes. Des partis nationalistes blancs sont apparus en Colombie-Britannique, en Alberta, en Ontario et en Saskatchewan. À l’échelle nationale, le Parti populaire de Maxime Bernier courtise ouvertement les militants fascistes et anti-immigrés – ils ont obtenu près de 900 000 voix aux dernières élections.
Les experts d’extrême droite promeuvent le déni du traitement génocidaire des peuples autochtones. Encouragés, des racistes d’extrême droite ont envahi les terrains d’un pensionnat de la Colombie-Britannique pour le déterrer et prouver qu’il n’y avait pas de tombes.
Ensuite, il y a le mouvement des « convois » qui prétend parler de liberté mais organise des attaques contre les libertés individuelles : la liberté de choix de la femme ; le droit d’une personne de choisir qui elle aime ; la liberté d’exprimer son identité. Dès le début, les chrétiens d’extrême droite, les nationalistes blancs et les groupes fascistes ont participé activement à l’organisation des convois. Loups déguisés en mouton, ils prétendent être contre la censure « éveillée », tout en travaillant des heures supplémentaires pour détruire les individus, les groupes, les comportements et les organisations auxquels ils s’opposent.
Maintenant qu’ils ont réorienté leurs efforts vers les attaques des « droits parentaux » contre les 2SLGBTQ+, leurs racines fascistes sont révélées. Lors de leurs tentatives pour interdire les lectures de l’heure du conte dans les bibliothèques publiques et lors des manifestations anti-trans, ils se présentent en insignes nazis et font le salut fasciste, comme ils l’ont fait lors d’un récent rassemblement sur les « droits parentaux » à Burnaby. Pour avoir un aperçu de l’avenir, ce n’est pas fermé, comme en témoigne la Floride où des groupes nazis qui se sont montrés audacieux au sein du mouvement des « droits parentaux » brandissent désormais ouvertement la croix gammée devant Disney World.
Le Canada a un problème nazi.
Nos médias traitent ces événements comme des actes isolés, des actes de loups solitaires inadaptés, peu disposés ou incapables de relier les points et de creuser les racines systémiques du racisme. Ils ont fait un boomerang, passant de la minimisation de la menace au sensationnalisme d’une histoire piège comme celle des nazis dans la galerie de la Chambre des communes.
Les détails de la saga Yaroslav Hunka sont désormais bien connus. Le vétéran de 98 ans d’un bataillon volontaire SS nazi ukrainien a été invité par le président de la Chambre à s’asseoir à la tribune lors du discours de Volodymyr Zelensky au Parlement. Présenté comme un vétéran antisoviétique, pas un seul député n’avait l’intelligence ou le courage de mettre 2 et 2 ensemble et de proposer le nazi. Ils se sont levés à l’unanimité et ont ovationné chaleureusement le fasciste vieillissant.
Aujourd’hui, le président Anthony Rota a démissionné en disgrâce. Justin Trudeau, au visage rouge, présente ses excuses alors que son gouvernement semble à la dérive dans un océan de scandales et de blessures auto-infligées. Pierre Poilievre tente d’utiliser cette erreur à des fins politiques, oubliant commodément que trois de ses députés ont été surpris en train de déjeuner avec un eurodéputé euro-fasciste il y a à peine six mois.
La presse était en ébullition et cherchait à savoir comment le nazi nonagénaire était entré dans la galerie. Ils passent à côté de l’essentiel : comment ce nazi est-il entré dans le pays et est-il devenu citoyen canadien au lendemain de la Seconde Guerre mondiale ?
Il faut souligner que tous les ingrédients du fascisme et du nazisme se trouvaient au Canada bien avant sa création. Tout le projet colonial est raciste, basé sur la conquête et, si nécessaire, l’extermination des peuples autochtones « inférieurs » par définition. Cela permet aux conquérants de dépeindre leur brutalité comme de l’altruisme quand cela leur convient.
John A. Macdonald et les « Pères de la Confédération » étaient pour la plupart des partisans enthousiastes de la Confédération – en tant qu’avocat, Macdonald était employé par le Sud pour organiser la restitution des « biens » volés, c’est-à-dire des esclaves en fuite introduits clandestinement au Canada par le chemin de fer souterrain.
Dans les années 1920, le Ku Klux Klan s’est facilement implanté dans les provinces des Prairies. On disait que si vous vouliez progresser dans les affaires ou en politique en Saskatchewan, vous deviez faire partie du KKK. On croit que le futur premier ministre conservateur John Diefenbaker a fait ses débuts en portant une cagoule. Dans les provinces de l’Est, l’Ordre Orange avait la même idéologie raciste, mais sans les draps et les croix brûlées.
Ce n’est pas le torysisme seul qui a favorisé les ingrédients du fascisme. C’est une tendance libérale de supériorité et un racisme plus poli qui ont contribué à la pseudo-science de l’eugénisme dans les années 1920.
Il n’y a pas de place ici pour cataloguer les affronts racistes de la classe dirigeante canadienne et de ses deux chefs politiques, les partis libéral et conservateur. En résumé, la classe dirigeante a toujours eu besoin de nouvelles vagues d’immigrants pour travailler dans ses fermes, ses usines et ses mines. Et ces immigrants ont souvent apporté avec eux de nouvelles idées dangereuses, des idées comme la négociation collective, le socialisme et la solidarité avec les opprimés.
La classe dirigeante a favorisé la division pour régner, et les travailleurs ont été poussés par leurs circonstances à s’unir. Cette tension conduisait souvent à des explosions, comme la vague de grève générale de 1919. En 1933, les immigrants juifs de l’ouest de Toronto, ainsi que leurs voisins, battirent les « clubs à croix gammée » qui tentaient de se rassembler dans le parc Christie Pits.
Ce sont les deux courants rivaux de l’histoire canadienne : le courant officiel, qui blanchit le racisme, la violence génocidaire et l’exploitation ; et une de résistance et de lutte, pour s’unir et combattre.
Au sortir de la Grande Dépression et de la Seconde Guerre mondiale, la classe ouvrière canadienne avait pris pied pour les syndicats, et la lutte pour ces organisations dans les usines automobiles, dans les mines et sur les voies maritimes a amené les idées du socialisme comme outils de syndicalisation. Le Parti communiste avait une influence au-delà de son nombre et de sa politique stalinienne sans issue.
Une tactique pour combattre ce danger consistait à autoriser – voire à recruter – d’anciens nazis et leurs sympathisants à immigrer d’Europe de l’Est. Tous ceux qui étaient anti-rouges étaient les bienvenus. Des sociétés comme le géant minier du nickel Inco recherchaient activement d’anciens nazis – des gens comme les vétérans de la division Waffen SS Galatian d’Ukraine – pour contrôler le lieu de travail. S’ils ne parvenaient pas à détruire les syndicats, ils pourraient expulser les communistes et les socialistes de la direction et les remplacer par des types plus coopératifs. Les réactions négatives de la guerre froide n’ont jamais été aussi graves au Canada qu’aux États-Unis à l’époque de McCarthy, mais les mêmes processus étaient à l’œuvre et les ingrédients du nazisme ont été de nouveau encouragés.
À travers les hauts et les bas de la lutte des classes, ces ingrédients – la suprématie blanche, le racisme, la haine anti-immigrés, la misogynie et l’homophobie – n’ont jamais été loin de faire surface.
Rien ne résume mieux l’attitude équivoque de la classe dirigeante canadienne envers le fascisme que ses votes à l’ONU. Au cours de la dernière décennie, le Canada s’est abstenu ou a voté contre les résolutions condamnant la glorification du nazisme. Cette démarche lâche a été suivie en étroite collaboration avec les alliés de l’OTAN, dont la plupart ont accueilli d’anciens nazis dans leurs industries et leurs armées dans les années d’après-guerre.
Il n’est pas étonnant que notre Parlement lui-même ne reconnaisse plus le mal qu’est le fascisme lorsqu’il le voit. Le Canada continuera d’avoir un problème nazi jusqu’à ce que notre histoire raciste et génocidaire soit honnêtement confrontée et jusqu’à ce que la classe dirigeante qui manipule les forces de la haine et de la division soit vaincue pour de bon.
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